lundi 17 septembre 2012

CRISE EN COTE D’IVOIRE : L’INTERNET A MAINTENU LE CONTACT ENTRE LE NORD ET LE SUD


« Cela fait presque 3 ans que je ne suis pas allé dans mon village, situé dans la région de Bouaké. Mais grâce à la connexion Internet, j'ai les nouvelles de mes parents restés dans cette zone ", a expliqué récemment M.Benoît Koffi, un cadre de l'administration publique Ivoirienne. En effet, M.  Ernest Koffi, le jeune frère de Koffi, est propriétaire d'un Cybercafé à Bouaké la deuxième ville du pays et principal fief des rebelles.

Malgré la situation de guerre  son frère est resté sur place pour tenir son commerce. Qui, selon lui, a connu un boom avec la crise armée. De façon quotidienne, Benoît Koffi reçoit de son cadet des nouvelles de la famille et de cette moitié du pays sous contrôle des Forces nouvelles. Comme M. Benoît koffi , nombre d'Ivoiriens qui ont leurs parents et leurs biens dans les zones assiégées de l'ouest, du centre et du nord de la Côte d'Ivoire ont pu maintenir des contacts permanents avec les siens grâce à la magie de l'Internet.

En effet, Avant le déclenchement du conflit armé du 19 septembre 2002 qui a scindé la Côte d'Ivoire en deux,  la radio et télévision Ivoirienne couvrait presque l'ensemble du territoire national. Le téléphone fixe et plusieurs réseaux de téléphonie mobiles desservaient le pays. Mais la guerre a beaucoup perturbé les différents réseaux. Chaque partie voulant gagner la guerre coûte que coûte a décidé de contrôler toutes les communications et la circulation des hommes et des biens.

De sorte que depuis 6 octobre 2002, la radio et la télévision publiques ont cessé d'émettre à Bouaké, et dans toutes les zones occupées. Les rebelles vont créer leur propre radio et télévision pour la diffusion de leur idéologie. Avec les différents combats dans les zones occupées au tout début de la rébellion armée, les réseaux téléphoniques fixe et mobiles, très sollicités par les populations en détresse et aussi par les forces en conflits, seront saturés ou simplement hors d'état de service. De sorte qu'il était quasi-impossible d'établir la communication entre les deux zones du pays .

Pour joindre les zones occupées et vice-versa fallait avoir recours aux moyens de communications ultra-performants comme les téléphones satellitaire . "  C'est  grâce à mon téléphone satellitaire que j'avais des nouvelles de ma famille restée à Man ", explique Gonto Mathieu, un cadre d'une entreprise multinationale. Avant d'ajouter qu'avec le système de " Tchat " sur Internet il échangeait aussi avec sa femme presque tous les deux jours. Seulement, la grande majorité de la population Ivoirienne, du fait, du coût élevé de cette forme de communication, ne peut y avoir accès. La connexion Internet s'avère alors comme l'unique moyen très efficace et à moindre coût pour maintenir de façon virtuelle le contact entre les Ivoiriens.
Les combats dans les zones occupées ont poussé la population la plupart des propriétaires des nombreux cybercafés des zones assiégées à fuir vers la partie du pays sous contrôle gouvernementale et les pays voisins en abandonnant  ainsi leurs biens.

" Avant la crise armée la ville de Bouaké comptait plus d'un million d'habitants et des milliers de cybercafé moyennement fréquenté. Les différents combats que se sont livrées les forces armées nationales et les forces rebelles dans la ville ont contraint beaucoup d'habitants à déserter la localité. " relève Koné Seydou, un gestionnaire de cybercafé à Bouaké .

Ainsi plusieurs cybercafés seront fermés. Les gestionnaires qui n'ont pas fui la guerre vont continuer d'ouvrir les leurs. " Curieusement c'est dans cette période que le nombre d'internautes a commencé à croître dans notre cybercafé " se souvient M. Koné . Avant  d'expliquer, sa clientèle est passée de 35 personnes avant la crise à 80 personnes par jour en pleine crise. " Alors que nous n'avions que 10 postes ordinateurs connectés. Certains passaient presque toute la journée dans le cybercafé " . Ernest Koffi ne dit pas autre chose quand il indique que son cybercafé , installé au quartier Air-France ne désemplissait pas de sorte que pour satisfaire le maximum d'internautes, il ont ouvert 24H/24H. Alors que l'heure normale  d'ouverture des Cybercafés dans la ville est de 8h et la fermeture à 20h Gmt.

Nombre de clients sont, selon les responsables des cybercafés, constitués de novices en matière d'Internet. Ils viennent se faire créer des boites électroniques pour recevoir des nouvelles du Sud du pays et aussi des parents à l'étranger. Certains lisent les journaux Ivoiriens et étrangers ou/et écoutent les télévisions et radios étrangères. En effet, Sur la quinzaine de quotidiens Ivoiriens, il y  a une bonne dizaine qui affiche sur le net. Et qui actualise de façon quotidienne le contenu de leur site web. Certains journaux Ivoirien font même du continu. C'est le cas du journal pro-gouvernemental FRATERNITE MATIN (www.fratmat.info) . A partir de sa rédaction web le journal actualise 4 fois par jour le contenu de son site. Et développe un système de dernière heure comme les agences de presse. Ce site a été tellement sollicité pendant les périodes chaudes que lors des derniers évènements sanglants du début Novembre le site web de Fraternité Matin a craqué. Les habitués, eux, viennent " tchater ".

Un nouveau type d'internaute a commencé a faire son apparition en zones occupées. Il s'agit des personnes du troisième âge et des populations rurales qui se sont déplacées dans les grandes villes. " Les personnes âgées et les populations rurales qui à priori ne se sentent pas concernées par les nouvelles technologies ont commencé à fréquenter les cybercafés . C'est le cas du vieux Tanoh Brou qui chaque matin se rend dans notre cybercafé situé au centre ville avec son petit fils. Celui-ci a crée une boîte électronique sur instruction de leur aîné qui vit en France.

Ainsi chaque jour ils viennent " Tchater " avec lui et lui donner les nouvelles du village.
Face à cette croissance d'internautes et l'accalmie sur les fronts militaires avec la signature du " cessez-le feu " et les différents accords entre les parties en conflit, nombre de jeunes et même des cadres retournés en zone occupée vont créer plusieurs cybercafés. " Il faut reconnaître que le retour sur investissement dans ce secteur d'activé est  très intéressant. Moi j'arrive à me faire facilement 1 million de Francs Cfa par mois. " souligne  Seydou Koné. C'est que , depuis le 19 septembre 2002 et ce jusqu'au mois de Mai 2005 les consommations  d'électricité, d'eau et de téléphone n'étaient plus facturées dans les zones assiégées. Alors que ces zones étaient toujours alimentées.
Ainsi les gestionnaires des cybercafés, n'avaient que pour unique charge l'abonnement chez les fournisseurs d'accès internet. Alors que la navigation est facturée à 500 FCFA par heure aux internautes.

Théodore Kouadio

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